Scène de rupture


 

Dimanche matin, pleine lune en Capricorne, mon signe et celui d'un gars rencontré exactement 24 ans plus tôt (suprême ironie, l'astrologie ayant été souvent un sujet stimulant ma curiosité ou mon côté ludique, mais qui généra des réactions négatives très fortes chez lui). C'était une semaine après la fête de la Bastille, en France de l'année 2000. Je découvrais l'Europe pour la première fois. Celui qui devint le père de mes trois fils bien-aimés me demanda, au déjeuner d'une auberge de jeunesse, si j'étais ''américaine'', ce à quoi je m'empressai de répondre par la négative ! Diantre non... The rest is history, comme on dit.


Grand Canyon, décembre 2001, et lieu de la prmière d'une longue série d'épiques querelles au cours desquelles il emmenait la moindre de mes opinions au tribunal et il me fallait justifier tout de moi. Cette fois-ci, il s'agissait de mon intérêt pour le signe du zodiaque que nous partagions !

Silence lourd, persiennes closes, poubelle débordant de Kleenex, écho de nos propres pas dans une maison désertée qui fait mal, nourriture sans saveur ou qu'on laisse périr, vaisselle et linge sale qui sont en compétition de négligence, le regard qui se perd dans le vide pour de longues heures, vêtements qui deviennent trop grands pour un certain temps. Voilà à quoi ressemble souvent le décor d'un coeur brisé...

Aujoud'hui, je vis comme une rupture en dedans. Et à plein de niveaux de ma vie. Je me souviens encore de ce que je portais lors de ce marquant 21 juillet. D'ailleurs, je l'ai encore, ce t-shirt. Dans une boîte, avec photos, et autres souvenirs de cette autre vie, évidences de rupture. S'il y eut un crime en ce qui me concerne, ce fut celui d'avoir aimé. La rupture n'est pas toujours comme la pulvérisation d'une flûte de champagne ou l'arrachage d'un diachyllon. Parfois elle s'étale sur plusieurs années, agonisante, jusqu'à ce que le monde de la forme rattrape la dimension énergétique du monde subtil et de l'âme. 

J'ai cherché un petit rituel comme on suggère aux personnes qui vivent un deuil afin de favoriser une résolution des émotions, quelque chose de concret qui marque un achèvement. Je me suis retrouvée à me replonger dans cette époque révolue, quand cet ex fit de moi une backpackeuse. J'ai été envahie de compassion, attendrie de mon visage candide qui ne s'imaginait pas la suite... Je ne me revois plus tellement dans cette jeune personne au visage plus rond qui porte du orange, qui tombe sous le pseudocharme d'un argumentateur aggressif et égotistique se faisant passer pour un philosophe ou conversationnaliste sophistiqué. Heureusement... 



Grande adepte du ''faire avec'', je commençai à explorer mes options. Avec des mini-branches dans ma cour et une mini-cabane d'oiseaux trouvée dans un kit de bricolage ayant appartenu aux enfants, j'ai improvisé un projet symbolique, qui ferme le chapitre de femme mariée avec un homme oppressif, contrôlant, obsessif et tourmenté, et qui amorça un renouveau, une étape de vie centrée encore plus sur nos enfants. J'ai leurs initiales sur chaque façade et en-dessous, j'ai écrit un message:

Il existe un nid auquel vous pouvez toujours revenir 

et il s'appelle ''l'amour de votre mère". 

Je vous aime pour toujours, 

Maman Caro.






Parfaite synchronicité aussi étant donné que j'appris au lever que je peux dorénavant me targuer du titre d'auteure de meilleures ventes au niveau international. En effet, un livre auquel j'ai contribué est devenu bestseller en moins de deux jours, et numéro un dans trois catégories, dont ''résolution de conflits familiaux". Ce n'est pas du tout le résultat que je cherchais, en toute honnêteté. J'ai participé pour la cause, pas avec un but spécifique en tête. Il y a une dizaine d'années, mon ego en aurait été flatté. Maintenant, je vois plus cela comme un clin d'oeil de l'univers me disant que les choses commencent à changer de direction, mes projets m'emmènent dans une trajectoire positive et pleine de possibilités, et me motivent à continuer à livrer mes messages et à être une voix pour les enfants qui sont victimes d'aliénation parentale, et une voix aussi pour leurs parents ostracisés.

Même si mon ego a enfin été réduit à des proportions plus raisonnables, il n'en demeure pas moins que je souris intérieurement en vivant une sensation proche du triomphe devant l'ironie de cet accomplissement, pour ne pas dire succès: mon ex a souvent méprisé ma passion pour l'écriture, ignoré ou attaqué mes nombreuses publications, mais malgré tout j'ai continué à écrire avec passion, acharnement, souvent en secret, dans les interstices du temps. Je suis fière de n'avoir jamais laissé ses commentaires dénigrants ou ses attaques me décourager d'écrire, car m'empêcher d'écrire revient à me priver d'oxygène. C'est une grande leçon pour moi: il faut honorer ses talents et continuer de regarder en avant malgré les obstacles ou distractions sous forme d'esprit envieux et malveillant. Je n'enlève rien à personne en suivant les murmures de mon âme. Au contraire, j'espère inspirer toute personne qui a des doutes ou un manque de confiance à s'écouter et à foncer !

Tout comme un exercise vigoureux ou maladie nous font des découvrir des muscles ou des organes dont nous ignorions l'existence, la souffrance de l'âme qui est en peine pour avoir eu le courage de diffuser sa lumière nous fait réaliser notre incroyable et divine capacité d'aimer. 


Un jeune moi, pré-mariage, pré-maternité, 
Napa Valley, juin 2001



Mon moi nouveau, transformé de l'intérieur, Parc de Rancho Cordova,
avant les feux d'artifice du 4 juillet 2024.






Comments

  1. Chère Caroline, ton texte est très émouvant. J’y reconnais des blessures que j’ai subies il y a très longtemps… J’admire ton courage.

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