La maison, gardienne du silence
J'y trouve chaque fois refuge comme si ses murs protégeaient une liberté de ressentir, de penser, d'être. Je découvre une autre magie de la Maison des Enchantements, à savoir sa protection de ma bulle de silence, qu'une affection des mes cordes vocales a rendue nécessaire afin de faciliter leur récupération.
Comme si ma zone vulnérable se trouvait dans mon chakra de la gorge, c'est justement là que la fatigue et le stress semblent aimer se cacher. J'avais 17 ou 18 ans ce soir de Noël où c'est avec une voix éraillée que j'offris des voeux à ma famille durant une brève capsule à la radio communautaire (car le frère de ma fréquentation de l'époque y était animateur). J'en reviens juste pas que l'on ait même diffusé ma voix qui sonnait comme si quelqu'un essayait de scier une boîte de conserve vide. J'ai par la suite connu le même sort à raison d'une fois par an ou aux deux ans. Puis, mes études en médecine m'ont enseigné que c'est causé par le virus parainfluenza. Je connais le traitement qu'il faut prescrire: hydratation, repos. Cela a l'air de rien, mais c'est souvent les remèdes les plus simples qui sont difficiles à suivre !
Il y a quelques années, en raison de mon travail où je suis appelée à utiliser ma voix de façon répétée auprès de patients, étudiants etc, sans compter les conférences en dehors des heures de travail, j'ai commencé à me demander si j'étais affligée de la même chose que ma mère quand j'étais enfant. Je me souviens qu'elle s'était fait opérer à quelques reprises pour des ''nodules sur les cordes vocales''. Je me revois, depuis le comptoir de la cuisinette près du mur où était accroché le téléphone beige, écrire tout dans un cahier pour communiquer avec nous afin de reposer sa voix. Elle écrivait en lettres attachées, et je ne savais pas encore comment lire son écriture, c'est donc que j'avais environ 6 ou 7 ans. Je le lui dis mais elle persista dans sa calligraphie indéchiffrable pour moi. Ce déséquilibre de son système avait quelque chose de mystérieux pour moi. Ayant toujours consigné avec soin les antécédents médicaux familiaux depuis des décennies, je me suis demandé si le même sort m'avait été réservé. Mais l'endoscopie faite il y a quelques années n'a pas révélé grand'chose à part une irritation. J'ai par la suite été référée en orthophonie. J'avais toute une liste d'exercices à faire. Je suis embarrassée de dire que je n'ai pas été assidue avec ce genre de devoirs.
Me revoilà donc au même point. Mais vendredi, après une semaine pénible d'infection du tractus respiratoire supérieure, j'ai vraiment senti, comme dans une scène finale sadique, cette saleté de microbe descendre dans ma gorge comme un rideau qui tombe sur mes cordes vocales, me confinant à un mutisme cruel. Il fallut donc que je prenne la priorisation du repos de ma voix au sérieux. Je n'ai pas dit un mot de la journée hier (mon rire était sec et bloqué). Je me suis plutôt consacrée à une lecture débutée il y a plus d'un an mais qui n'aboutit pas, car je sentais que la teneur du texte me dépassait. Mais hier, après qu'une personne dont j'ai fait la connaissance par téléphone en raison de nos histoires semblables m'en parla et m'invita à lire un passage précis, je m'y suis remise en partie parce que j'ai souhaité voir dans un jeu de mots plus qu'une coïncidence ou convergence. Comme je me prépare actuellement pour un voyage de course, j'ai trouvé qu'un Cours en Miracles (A Course in Miracles) était tout à fait approprié pour le programme... Une Fille qui Court ! J'entraîne mon corps, alors aussi bien entraîner mon esprit en parallèle, car c'est vraiment ce que le Cours fait. C'est tellement conceptuel et dense par bouts qu'il faut allouer un espace précis dans le temps et l'espace. Et le livre grand format, édition augmentée, pèse 1,28 kg. C'est donc pas un bouquin qu'on savoure dans la baignoire ou une lecture légère que l'on feuillette en avion. Cela prend une surface assez grande pour le déployer, prendre des notes et avoir de la caféine à portée de la main pour rester bien attentif. J'ai sélectionné un journal dans lequel je note des passages ainsi que mes réflexions, interprétations et questions. Ce n'est pas tant le contenu qui compte que le cadre, un qui encourage la pause, le calme, la méditation et l'affranchissement de l'ego.
Mon objectif est de lire un chapitre par jour. J'ai complété le quatrième ce matin. C'est très réaliste. Il y a de profondes vérités dans cet écrit. Merci à ma mère et mon frère qui me l'avaient offert il y a quelques années pour les festivités d'hiver ! Deux des personnes de ma famille les moins susceptibles de le lire LOL, et ce, pour des raisons différentes... Il n'en demeure pas moins que c'est très apprécié. Faut croire qu'au fond, elles me connaissent assez pour percevoir que cet ouvrage aura une signification pour moi, pour ne pas dire un pouvoir guérisseur.
Captivée par ma découverte, j'en ai comme oublié de placotter. J'ai donc continué dans ma fin de semaine de silence. J'ai dû reporter la séance de l'enregistrement du podcast The Dandelion Reflections avec Christopher car la nuit a été difficile et je dois vraiment continuer sur cette chasteté vocale pour éviter d'annuler ma journée avec mes patients demain. Grâce à mon silence intérieur auto-imposé, je peux remarquer davantage les doux sons du carillon dans ma cour, le bruissement des feuilles, et les chants des oiseaux qui communiquent une joie comblant mon être. Le temps s'écoule différemment on dirait quand on pratique le silence ou la parcimonie du verbe. On va à l'essentiel dans la communication comme dans les gestes, ce qui libère en même temps une certaine créativité. J'ai même fait un dessin hier... Cela fait du bien !
Et une magie mène à une autre... J'avais trouvé une lampe à 3 $ dans mon magasin d'occasion local. N'ayant pas trouvé de prise de courant à proximité de l'endroit où je comptais l'installer, je dus me résoudre à acheter un fil d'extension hier. Puis, en dégageant une garde-robe dont j'ai retiré les portes et que je compte utiliser comme espace pour élargir la pièce du foyer est et où je mettrai la lampe, devinez quoi ? En retirant un sac de randonnée et deux de mes sacs d'école du primaire (oui, je les ai encore...), une prise de courant est apparue sous mes yeux ! Je peux pas croire qu'en deux ans je n'en avais jamais remarqué l'existence ! Comme on dit, cet élargissement de mon espace de vie, sur fond d'un silence spirituellement productif, ''was meant to be''.
Bref, ma maison est complice dans mes trouvailles en plus de cette étape de mon cheminement vers plus de silence et de paix intérieure, et je lui en suis tellement reconnaissante !
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